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Publié à l’origine en espagnol: ‘¿Quién es Quim Torra, el próximo presidente de la Generalitat?’.Manel Manchón. Crónica Global.
10th Mai 2018
L’homme choisi par Puigdemont a été président d’Òmnium Cultural [association très active du mouvement sécessionniste] et se vante de s’investir pour l’indépendance avec toutes les conséquences que cela implique.
Quim Torra (Blanes, Espagne, 1962) est l’homme qu’a choisi Carles Puigdemont pour présider la Generalitat de Catalogne, après une réunion à Berlin avec la direction du parti indépendantiste de droite PDeCAT et après avoir écarté un autre homme fidèle à l’ancien président, Josep Costa, vice-président du Parlement autonome de la Catalogne.
Torra, indépendantiste convaincu depuis sa jeunesse, appartient aux milieux journalistiques de l’ancien président. Il a rejoint la liste de Junts per Catalunya, la coalition électorale avec laquelle Puigdemont s’est présenté aux élections régionales du 21 décembre 2017, à initiative de Puigdemont lui-même. En plus d’être éditeur, il a travaillé plus de 20 ans —dont deux en Suisse — dans une entreprise multinationale d’assurance. Il sera bientôt le locataire de la Generalitat, bien qu’étroitement connecté avec Puigdemont pour le moment.
Son indépendantisme à outrance l’a amené à prononcer des commentaires qui avaient alors provoqué de fortes polémiques. « La honte est un mot que les Espagnols ont retiré de leur vocabulaire depuis des années », a-t-il dit. Il a également attaqué certains hommes politiques des partis espagnols, tels que le leader de Ciudadanos [centre-droite non-indépendantiste] : « Entendre Albert Rivera parler de moralité, c’est comme entendre les Espagnols parler de démocratie », a-t-il ironiquement déclaré.
« Occupés depuis 1714 »
Fondateur de la maison d’édition A contra vent, Quim Torra est l’un des plus fidèles dirigeants de Puigdemont. Parmi ses déclarations, on peut relever en particulier : « Les Espagnols ne savent que spolier ». Mais aussi d’autres petites phrases, comme celle-ci au sujet du Parti Socialiste Catalan : « Les pauvres, ils parlent l’espagnol comme les Espagnols » ; ou encore : « Nous les Catalans roulons dans nos voitures particulières et payons pour tout, ce n’est pas comme les Espagnols. »
Quim Torra a été le directeur du Centre Culturel Born, à Barcelone, qui a organisé en 2014 les cérémonies de commémoration du tricentenaire du siège de Barcelone de 1714 [la dernière bataille de la Guerre de Succession d’Espagne et date mythique pour les indépendantistes]. « De toute évidence, nous vivons occupés par les Espagnols depuis 1714 », a-t-il affirmé.
Une commande de Xavier Trias
Ce projet, qui avait été présenté comme une récupération historique —interprété à sa manière par le mouvement indépendantiste— avait provoqué un énorme schisme parmi les historiens, et entre le Gouvernement catalan, présidé à l’époque par Artur Mas [chef du même parti avant Puigdemont], et l’opposition.
Ce projet était une commande du maire de Barcelone de l’époque [de 2011 à 2015], Xavier Trias, qui avait chargé Quim Torra de réaliser la promotion d’une série d’événements qui étaient censés chauffer l’atmosphère pour le référendum —ensuite appelé simplement « consultation »— du 9 novembre 2014. Torra compta sur la collaboration de deux autres propagandistes de la cause indépendantiste, les journalistes Toni Soler et Miquel Calzada, plus connu sous le nom de Mikimoto.
« Faire la République »
Ces derniers mois, Torra a voulu prendre les rênes du discours indépendantiste avec deux principes : élargir la base de l’indépendantisme, mais en clarifiant le langage. Son idée, et c’est pourquoi Puigdemont l’a choisi, est que le processus d’indépendance doit avoir une traduction pratique, c’est-à-dire : « si nous parlons de faire la République, nous le faisons, et sinon, nous ne devons pas le dire ».
Mais Torra a accepté le plan de Puigdemont, basé sur le rôle d’étoile que doit occuper pour le moment l’ancien président depuis Berlin. Dans différents entretiens, Quim Torra a affirmé qu’avec les leaders indépendantistes « en exil », le dit processus souverainiste « s’internationalise ».
Radical dans l’utilisation du langage, dans le sens où ce qui est dit doit être fait, Torra devra maintenant former un Gouvernement qui devra forcément travailler à la gestion, quel que soit le degré de pression qu’il recevra de la part de Puigdemont depuis Berlin.