Publié à l’origine en espagnol. Daniel Capó. The Objective.
Les défaites politiques sont souvent le résultat d’erreurs d’intelligence. C’est la thèse que soutient l’historien Marc Bloch dans l’un de ses livres les plus lucides. – L’étrange défaite – et il devient inévitable dans ces moments de grande inquiétude civile de nous retourner vers lui. L’étrange défaite est celle d’un monde relativement prospère et raisonnable, qui depuis 1978 a apporté à notre pays des libertés et des droits, des coutumes et des valeurs européennes, une stabilité démocratique, et un développent des autonomies (l’équivalent des régions en Espagne). Ce n’est bien évidemment pas un monde parfait, mais bien meilleur que n’importe quel autre régime politique qu’ait connu l’Espagne ces deux cent dernières années. Ce monde –qui est le notre – se trouve gravement menacé.
Nous vivons l’étrange défaite d’un pays qui ne sait pas – et j’ignore s’il le souhaite – affronter la réalité. L’improvisation et ce refus de la réalité sont de mauvais conseillers pour l’Espagne lorsque l’on a simplement renoncé à l’intelligence politique au nom d’une gestion plate et bureaucratique des conflits sociaux. En réalité, l’étrange défaite serait tout sauf étrange, mais plutôt le résultat des dirigeants et des élites qui ne se sont pas comportés comme tels. Nous avons voulu rationaliser l’action d’un gouvernement au lieu d’accepter que ce qui se trouvait en surface était bel et bien réel. Après les scènes dramatiques d’hier rien ne sera jamais comme avant. Et quoi qu’il arrive, un traumatisme sillonne désormais la colonne morale du pays.